jeudi 1 septembre 2016

Comment décider du sort des embryons congelés ?

Les émissions de télévision sont nombreuses à parler de la PMA. Moi-même, j’ai pu participer ou apparaître plusieurs fois dans l’émission « Les maternelles », et une fois dans « Toute une histoire ». A chaque fois, le thème était la difficulté du parcours PMA ou encore la douleur face à la stérilité.

Il y a eu aussi d’autres émissions qui ont parlé des couples ayant eu recours au don de Sperme ou d’ovule et des difficultés qu’ils ont dû affronter. Il existe par contre un sujet lié à la PMA pour lequel je n’ai jamais vu d’émission à la télévision. C’est le sujet dont je vais vous parler maintenant.


Avant de l’évoquer, un petit rappel sur le fonctionnement d’un parcours PMA s’impose.

Pour faire simple, disons simplement qu’une tentative de PMA, c’est d’abord une stimulation ovarienne pendant environ 2 semaines (injections quotidiennes pour madame, prises de sang, échographies quasi tous les 24 ou 48 heures, etc), puis un déclenchement (injection d’un produit déclencheur à une heure précise), suivi le lendemain d’une ponction sous anesthésie générale ou locale (choisissez l’AG !) pour recueillir les ovocytes, puis d’une fécondation par injection au cœur dans les ovocytes des spermatozoïdes fournis généreusement par Monsieur tandis que madame se faisait ponctionner (messieurs, nous avons vraiment la partie la plus simple !). Pour finir, on attend deux jours que les ovocytes fécondés se développent en embryons qui sont ensuite réimplantés dans l’utérus de madame. Je résume vite et certainement très mal.

Le rêve de tous les patients de PMA c’est qu’à l’issue de chaque tentative, il y a un maximum d’embryons viables et de bonne qualité (chaque embryon étant noté en termes de qualité) car cela permet ensuite un nombre plus important de transferts et donc de chance de grossesse.

Autrement dit, si à l’issue d’une ponction on ne parvient à obtenir que 1 ou 2 embryons viables, il n’y aura qu’un seul transfert (on peut transférer deux embryons d’un coup pour augmenter les chances, mais il y a un risque de grossesse double), et donc une seule chance. Par contre, si 4 ou 5 embryons sont obtenus, vous pourrez faire potentiellement 3 transferts (2 transferts avec 2 embryons, et un transfert avec un seul). C’est important, car la sécurité sociale ne rembourse à 100% que 4 tentatives, autrement dit, 4 ponctions.

Les couples sont donc inégaux dans leurs chances de réussites, car sur 4 ponctions, certains couples bénéficieront par exemple de 4x3 = 12 transferts s’ils obtiennent en moyenne 5 ou 6 embryons par tentative, alors que d’autres couples ne bénéficieront que de 4 transferts s’ils n’obtiennent qu’un seul embryon à chaque ponction. Voir moins si une ou plusieurs ponctions ne donnent aucun résultat. Tout cela pour expliquer que chaque couple rêve d’avoir un nombre important d’embryons à l’issue de chaque tentative.

Si par chance, la grossesse survient après le transfert de vos deux premiers embryons sur les 5 ou 6 embryons obtenus, les embryons supplémentaires sont mis en congélation, pour être réutilisés plus tard pour une seconde grossesse, ce qui évite de refaire une ponction.

C’est ce sujet donc je voulais vous parler justement. Car cette conservation n’est pas illimitée. La loi impose un délai maximum de conservation de 5 ans. 

Au bout de ce délai, vous devez faire un choix : soit réutiliser vos embryons pour une nouvelle tentative de grossesse, soit les donner anonymement pour en faire bénéficier d’autres couples, soit les donner à la science pour des expériences, soit les détruire.

Le choix le plus sain et naturelle est de réimplanter ces embryons pour de nouvelles grossesses. Mais ce n’est pas si simple. Ceux qui font de la PMA ne réussissent pas souvent tout de suite, mais au bout de plusieurs années. Or quand les parents ont plus de 40 ans, démarrer de nouvelles grossesses n’est pas forcément la solution la plus évidente. Personnellement, je vais avoir dans quelques mois 47 ans ; je m’imagine mal, à 48 ans par exemple (peut-être plus), de nouveau en train de pouponner.

Il y a aussi d’autres problèmes qui peuvent empêcher ce choix : des problèmes de santé pour madame, surtout au-delà d’un certain âge ou tout simplement des problèmes matériels qui font qu’une famille à 4 est viable, mais pas à 6 ou 7 (taille du domicile, ressources, voiture, etc).

Les autres choix sont complexes. Le don est le plus beau d’entre eux, car cela permet à des couples stériles de devenir parents. Oui, mais ce n’est pas si simple : ce que l’on donne ici, ce n’est pas un ovule ni un spermatozoïde. On donne un embryon ; on donne un vrai enfant du couple. Potentiellement, on donne donc le petit frère ou la petite sœur de l’enfant déjà né.

Ce choix a des implications assez énormes. On se demande sans cesse, si on les donne, si on ne va passer le restant de notre vie à imaginer la vie de nos enfants biologiques, ou à observer la tête des enfants que nous croiserons plus tard, en vacances ou ailleurs, en nous disant que, tiens dis donc, celui-là il ressemble à notre fils quand il était petit ?

Il y a aussi un autre problème, lié à l’anonymat du don. On voit régulièrement dans la presse des histoires de jeunes femmes ou de jeunes hommes nés d’un don, se battant avec la justice pour connaître l’identité du donateur d’un spermatozoïde, d’un ovule ou dans le cas de l’adoption, pour connaître l’identité des parents biologiques.

Personnellement, je préférerais avoir le droit de permettre au futur enfant à naître de connaître notre identité ou tout simplement notre histoire si un jour cette question l’obsédait. Mais la loi ne le permet pas. Je vous invite à lire mon billet sur le sujet, que j’avais écrit il y a quelques temps déjà : cliquer ici.

Les dernières options sont encore plus difficiles : la destruction ou le don pour la science sont comparables. Et cette option, il est clairement difficile de s’y résoudre.

Mon épouse et moi allons devoir bientôt prendre une décision. Il nous reste trois embryons de bonne qualité, à l’issue de notre dernière tentative de PMA qui a permis la naissance de notre fille. D’ici la fin de l’année, nous devrons nous décider. D’année en année, nous reportons ce moment où il faudra trancher, juste parce qu’aucune des possibilités ne nous semble acceptable.

Le sujet n’est pas simple et certains ne le comprennent pas. Quand j’ai évoqué ce sujet il y a un ou deux ans dans cette page, une personne m’avait répondu sèchement que si nous ne voulions pas une grande famille, il ne fallait pas « produire » autant d’embryons. Réponse stupide, car chacun comprendra ici qu’on ne choisit pas le nombre d’embryons quand on fait une tentative.

Bref, c’est une situation complexe et sauf erreur de ma part, personne n’en parle dans les medias. Il doit pourtant bien exister d’autres couples qui ont dû faire face à cette situation particulière et qui ont su faire un choix.

Si vous êtes dans ce cas, votre histoire nous intéresse. N’hésitez pas à me contacter en message privé sur la page Facebook PMA.

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